La Colère, une source de bien-être sous-estimée — Comment l’utiliser avec Bienveillance ?
C’est l’histoire d’un couple qui dîne au restaurant. Voici un extrait de leur conversation :
- Le mari : “Chérie, je suis navré de me mettre en colère aussi souvent. Je me demandais, comment fais-tu pour rester aussi calme quand j’explose comme ça ?”
- L’épouse : “Et bien, je vais juste nettoyer les WC quand ça arrive.”
- Le mari surpris :”Wow. Vraiment ? Et ça marche ?”
- L’épouse : “Bien sur que ça marche, j’utilise ta brosse à dents”.
J’adore cette histoire parce qu’elle illustre parfaitement les 2 expressions de la colère les plus courantes :
- La colère explosive — c’est lorsque nous exprimons nos frustrations, agacements etc, dans l’excès. C’est par exemple quand nos mots dépassent nos pensées : “de toute façon tu n’es qu’un incapable ! Tu n’arrives même pas à accrocher un tableau au mur !”. Dans le pire des cas, elle peut entraîner la personne à commettre des actes violents.
- La colère étouffée — C’est lorsque la personne enferme sa colère en elle. Elle est caractéristique des gentilles filles ou des gentils garçons qui passent leur temps à faire plaisir aux autres sans respecter et exprimer leurs propres besoins. Vous savez, c’est quand ça vous ronge et que ça hurle dans tous les sens à l’intérieur mais que rien ne sort de votre bouche. Résultat, elle s’exprime par de petites vengeances comme la brosse à dent dans les toilettes ou, plus courant, par des réponses sèches ou de petites remarques désagréables.
Mais exprimer sa colère de ces manières amène souvent à des remords.
Qui a déjà fait, ou dit quelque chose sous l’effet de la colère, qu’il a regretté plus tard ?
Combien de personnes me racontent qu’elles culpabilisent après une dispute et qu’elles ont peur que les conséquences de leur colère soit de perdre leur famille, leur conjoint ou leur travail.
Pour ma part, je faisais partie des étouffeurs de colère. Outre le risque d’ulcère que ce comportement implique, c’est surtout l’accumulation de frustrations qui rend malheureux et amène vers la dépression.
Pourtant la colère est une émotion saine. Et, quand elle est bien utilisée, elle peut amener beaucoup de bonheur dans nos vies.
Ce qu’il faut savoir, c’est que ce n’est pas notre faute si ont ne sait pas comment faire. Personne ne nous a appris à comprendre, identifier et exprimer notre colère à des fins positives. De plus, nous ne sommes pas tous égaux face à notre manière de réagir. En effet, nous n’avons pas choisi notre caractère et l’environnement qui nous a construit. Certains d’entre nous ont un tempérament plus calme ou plus vif que d’autres. Ceci-dit, et c’est là que tout bascule, nous avons tous le pouvoir, voir le devoir, de prendre la responsabilité de faire de notre mieux, avec ce que nous avons reçu.
Alors, comment faire de cette colère notre alliée et l’utiliser avec bienveillance ?
Tout d’abord, qu’est-ce que la colère ?
Vous le savez surement, la colère est une émotion. Et étymologiquement, le terme é-motion est composé de motion : “motere”, en latin qui signifie mouvoir et du préfixe “e” qui signifie vers l’extérieur. Ainsi, la colère, comme les autres émotions, est faite pour bouger vers l’extérieur, autrement dit pour s’exprimer.
Et qu’est-ce qui fait que l’on s’énerve et quels pourraient en être les bénéfices ?
La colère est une émotion naturelle et elle n’est pas là pour rien. Elle se déclenche quand l’une de vos valeurs ou l’un de nos besoins ne sont pas respectés. Son but est de nous protéger. Par exemple, lorsque que l’on vous coupe la parole, vous vous sentez offusqué. La colère monte parce que vous ne vous sentez pas respecté et/ou écouté. Ainsi vos valeurs “écoute” et “respect” étant perçues comme attaquées, votre garde du corps colère arrive pour vous défendre.
La colère est un signal d’alarme qui nous permet de discerner nos limites. Elle nous donne la possibilité de mieux nous connaître et de respecter nos besoins. Mieux se connaître est l’un des piliers fondamentaux pour avoir une bonne confiance en soi. Bien utiliser sa colère est donc un moyen de favoriser une bonne estime de soi.
La colère s’active différemment selon chaque individu. Tout au long de notre vie, nous avons vécu des événements qui ont façonné notre vision du monde. Il en est ressorti des valeurs et des besoins qui sont propres à nous même. Si certains traumatismes ne sont pas réglés, la colère va régulièrement réapparaître. Par exemple, si plus jeune, j’ai été victime de harcèlement, comme des moqueries ou une mise à l’écart, je vais me sentir en colère si mon collègue tient la porte à tout le monde sauf à moi. Cette situation va, consciemment ou pas, aller me connecter à une douleur passée non résolue. Même si, avec le recul, je me rends compte que quelqu’un l’a interrompu au moment où j’arrivais et qu’il ne m’avait pas vu, je vais quand même continuer à ressentir cette colère en moi.
La colère nous révèle et/ou nous rappelle encore et encore qu’il y a quelque chose en nous à aller soigner. Elle est le premier pas pour guérir nos traumatismes. La partie aimante et protectrice qui nous pousse à aller mieux.
C’est également une source d’énergie puissante qui invite à l’action. Si l’on reprend l’exemple précédent. Grâce à cette colère, j’ai un stock d’énergie disponible qui va m’aider à prendre mon téléphone, appeler un thérapeute pour me permettre de vivre en harmonie avec mes expériences passées. Puis, je pourrais continuer à utiliser son énergie pour monter une association contre la harcèlement et aider ainsi des centaines de personnes à guérir à leur tour. Cette colère peut nous porter. Utilisons son énergie pour nous faire du bien et aider les autres.
Comment faire alors pour lui laisser jouer son rôle sans qu’elle nous gâche la vie ?
La première étape à suivre quand les symptômes de la colère apparaissent est de
1. Respirer
C’est très simple comme action et pour autant pas si facile à appliquer. Ce qu’il faut comprendre, c’est que dans l’ère actuelle, les dangers ne sont plus les mêmes que ceux auxquels nous étions confrontés il y a des milliers d’années. Notre cerveau n’a pas évolué aussi vite que notre civilisation. Résultat, nous réagissons souvent de manière disproportionnée face à une situation. Ainsi, respirer va vous permettre de calmer toute cette agitation interne et passer à la seconde étape :
2. Se connecter à sa colère
Lorsque l’on est en colère, l’erreur à éviter est de se laisser aller au jugement de l’autre en lui attribuant la responsabilité de ce qui se passe en nous.
Ex : Lorsque Pierre passe devant votre bureau et ne vous dit pas bonjour, ça vous agace profondément. Les premières pensées qui vous traverse pourraient être : quel prétentieux celui-là, il se croit vraiment mieux que les autres. Qu’est-ce qu’il m’énerve ! C’est sa faute si je n’arrive plus à être concentré après, ça lui coûte quoi de dire bonjour franchement ?”.
Cette réflexion où l’autre est responsable de ce qui se passe en nous, ne nous amènera qu’un petit bénéfice à court terme. Le comportement de l’autre peut être le déclencheur de ma colère mais il n’est pas la cause de mes sentiments. Ainsi, admettre que nous sommes responsable de notre colère nous permet de reprendre le contrôle et mettre en place des actions qui seront positives sur le long terme. Ce n’est pas facile, je vous l’accorde, surtout au début, mais lorsque l’exercice devient une habitude, les bénéfices sont très appréciables.
Car admettre que l’autre n’est pas responsable de ma colère c’est s’offrir une sortie positive, qui me permettra, sur le long terme, de vivre en alignement avec ma personne tout en respectant les autres, permettant ainsi d’entretenir des relations épanouissantes.
Ainsi avec ce même exemple, se connecter à sa colère de manière bienveillante c’est d’abord :
- Observer ce qui c’est passé factuellement : “Pierre est passé devant mon bureau sans me dire bonjour.”
- Identifier mes pensées jugeantes. Exemple : quel prétentieux celui là” et s’en détacher pour prendre sa responsabilité. Remplacer l’expression « je suis en colère parce qu’ils… » par « je suis en colère parce que j’ai besoin de… » de cette façon nous passons à l’exploration :
- Explorer ce que ça a généré chez moi. Quelles sont les valeurs ou besoins qui ont été malmenés. Exemple : je me suis senti exclu et dénigré — j’ai besoin de me sentir reconnue en tant que personne — je ne me sens pas accepté — je ne me sens pas respecté etc…” Allez questionner votre colère : qu’est ce qui m’a vraiment agacé ? quel message cette colère veut me faire passer ? quel est mon besoin dans cette situation ? Qu’est ce qui est contre mes valeurs dans cette situation ?
Ces étapes vont nous permettre de finalement pouvoir :
3. Exprimer sa colère
Une fois identifiée, c’est le moment d’exprimer notre émotion. Vous vous rappelez l’étymologie du mot émotion ? “faire bouger vers l’extérieur : donc on la fait sortir.
Cette étape est souvent associée à de nombreuses peurs : je vais passer pour un faible, je vais être rejeté, ça va provoquer un conflit etc… Étant une pratique nouvelle, notre égo va aller titiller notre confiance en nous pour nous éviter tout changement. Or, c’est de cette manière que nous pourrons grandir, nous sentir libéré et créer de belles relations personnelles et professionnelles. Sortez de votre zone de confort vous en serez récompensés !
Pour exprimer la colère avec bienveillance, je vous invite à reprendre et exprimer les conclusions des étapes précédentes.
Exemple : “Lorsque tu passes devant mon bureau et que tu ne me dis pas bonjour, je me sens exclu et dénigrée.”
Et nous y ajoutons une demande qui satisfait notre besoin : “Pourrais-tu t’arrêter un instant pour me saluer le matin ?”
Il n’y a pas de jugement, l’autre peut donc accepter avec empathie votre colère et y répondre. Vous seriez surpris de constater que la plupart du temps, les comportements des autres ne cherchent aucunement à vous nuire, vous blesser ou vous énerver.
D’ailleur, voici la réponse de Pierre : “Avec plaisir oui ! Je n’osais pas rentrer car tu sembles tellement concentré quand tu travailles que j’avais peur de te déranger.”
Ce qu’il faut retenir de cet article :
La colère est un sentiment naturel qui, utilisée avec bienveillance peut nous permettre de
mieux nous connaître, nous connecter à nos valeurs, nos besoins et nos limites, nous aider à guérir nos traumatismes et nous pousser à l’action.
Il existe 3 étapes pour exprimer sa colère avec bienveillance
- Respirer
- Se connecter à sa colère : qu’est ce qui se passe en moi ? Quelles sont les valeurs ou besoins qui ont été bousculés ? De quoi ai-je besoin ?
- Exprimer sa colère avec empathie : ils s’est passé ça…. Cela a généré ça en moi… Est ce qu’il serait possible de… ?
Ces étapes permettront d’ouvrir le dialogue, de vous sentir aligné avec qui vous êtes tout en respectant l’autre.
Pour aller plus loin, je vous invite à lire la livre de Marshall. B Rosenberg : Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) sur la CNV (Communication Non Violente) dans lequel j’ai tiré beaucoup de matière pour cet article.
Je finirai avec cette citation de Antoine de Saint-Exupéry “On ne voit bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible avec les yeux.” Le petit Prince.
Si cet article vous a intéressé je vous propose d’aller lire d’autres articles sur mon site amae-coaching.com et de vous accompagner sur les problématiques de vie que vous souhaitez surmonter.